ÉVALUATION DES IMMOBILISATIONS ACQUISES AU MOYEN DE REDEVANCES ANNUELLES




Lorsque une transaction porte sur immobilisation incorporelle telle qu'un brevet, une marque ou droit exclusif d'exploitation, il peut être convenu entre les partie que le prix sera réglé, en tout ou partie, au moyen redevance annuelle.

Les redevance seront versées pendant une certaine durée et leur montant est proportionnel au chiffre d'affaires ou au bénéfice engendré par l'exploitation de l'immobilisation incorporelle acquise.

I - LE TRAITEMENT COMPTABLE

        A - A la date d'entrée dans le patrimoine de l'entreprise

Le Conseil national des commissaires aux comptes estime que le coût d'entrée de l'immobilisation incorporelle doit faire l'objet d'une estimation..

Le montant à retenir doit correspondre à la valeur vénale du bien au moment de la signature de l'acte. Cette valeur vénale peut être estimée :
    - soit par la valeur des redevance probable qui seront versées au cours de la période prévue ;
    - soit par l'évaluation retenue par les parties pour le paiement des droit d'enregistrement.

A la date d'entrée dans le patrimoine de l'entreprise, le brevet, la marque ou le droit exclusif d'exploitation doit être enregistré ainsi :

205000 Concessions et droits similaires, brevets, licences... (coût d'entrée)    
512000           Banque (sommes stipulée au contrat et réglée au comptant)    
404000           Fournisseurs d'immobilisation (partie estimée donnant lieu au paiement de redevances annuelles    

Nous supposons que l'acquisition est soumise aux droits d'enregistrement et non pas à la TVA.

        B - A la date d'écheance de la redevance annuelle

L'engagement de l'acquéreur ne se limite pas au montant de la dette initiale enregistrée au crédit du compte 404. En effet, les redevances doivent être versées jusqu'à l'expiration de la période de versement prévue.

     1er Cas : le compte de dette n'est pas encore soldé.

404000 Fournisseur d'immobilisations    
512000           Banque    

    2ème Cas : le compte de dette est déjà soldé.

678800 Charges exceptionnelles diverses    
512000           Banque    

En application du principe des coûts historiques, la valeur d'entrée de l'immobilisation n'est pas modifiée quel que soit le montant des sommes effectivement versées.

        C - A l'expiration de la période de versement

A l'expiration de la période de versement, si la dette envers le cédant est déjà éteinte, il n'y a aucune écriture à enregistrer dans la comptabilité de l'acquéreur. En revanche, si la dette n'est pas encore éteinte, l'acquéreur doit enregistrer l'écriture suivante :

404000 Fournisseurs d'immobilisations (pour solde)    
778800           Produits exceptionnels divers    

 

II - LE TRAITEMENT FISCAL

L'administration fiscale estime que la valeur d'entrée inscrite en comptabilité doit être considérée comme base provisoire d'amortissement. D'un point de vue fiscal, cette base provisoire doit être rectifiée en hausse ou en baisse en fonction des sommes effectivement versées par l'acquéreur. Selon la doctrine fiscale, c'est donc en définitive le coût d'acquisition réel qui doit être fiscalement amorti.

Il y a donc une divergence entre le traitement comptable et le traitement fiscal. En effet, lorsque le montant des sommes versées est supérieur à la valeur d'entrée inscrite en comptabilité, l'entreprise enregistre des charges exceptionnelles au lieu d'enregistrer une augmentation de la valeur d'actif. Il en résulte les conséquences suivantes :

    - d'un part, ces charges exceptionnelles ne sont pas fiscalement déductibles ;

    - d'autre part, les amortissements pour dépréciation enregistrée sont inférieurs aux amortissements fiscalement déductibles.

        A - 1ère solution : rectification comptable de la valeur d'origine

Si l'entreprise adopte cette solution, le règlement des redevances doit être enregistré ainsi lorsque la dette envers le cédant est éteinte :

205000 Concessions et droits similaires, brevets, licences...    
512000           Banque    

Le plan d'amortissement doit être révisé pour tenir compte de la nouvelle valeur d'origine de l'immobilisation incorporelle amortissable. En conséquence, à la clôture de l'exercice, l'amortissement pour dépréciation doit être enregistré de la manière suivante :

681100 D.A. des immos incorpo & corpo (pour le montant de l'annuité normale calculée sur la base de la nouvelle valeur d'origine)    
687100 D.A. exceptionnels sur immobilisations (montant de la majoration des amortissements antérieurs)    
280500           Amortissement des concessions et droits similaires, brevets, licences...    

Cette solution ne respecte pas le principe des coûts historiques mais elle présente l'avantage d'être conforme à la doctrine fiscale.

        B - 2ème solution : utilisation d'un compte d'amortissement dérogatoire

Dans ce cas, la mise en oeuvre du principe des coûts historiques conduit à ne pas rectifier la valeur d'origine comptabilisée. Dès que la dette envers le cédant est éteinte, les écritures suivantes doivent être enregistrées :

A la date de règlement des redevances :

678800 Charges exceptionnelles diverses    
512000           Banque    

A la date de clôture de l'exercice :

        - constatation de l'amortissement pour dépréciation :

681100 D.A. des immos incorpo & corpo (montant de l'annuité normale calculée sur la valeur d'origine)    
280500           Amortissement des concessions et droits similaires, brevets, licences...    

        - constatation du supplément d'amortissement fiscalement déductible :

687200 D.P. réglementées (immobilisation)    
145000           Amortissements dérogatoires    

A la fin de la période d'amortissement de l'immobilisation incorporelle, le compte 145 "Amortissements dérogatoires" devra être soldé : le produit exceptionnel enregistré en contrepartie ne sera pas imposable et devra donc être déduit extra-comptablement dans le tableau n° 2058-A.

 

 

EXEMPLE SUR L'ÉVALUATION DES IMMOBILISATIONS ACQUISES AU MOYEN DE REDEVANCES ANNUELLES




Acquisition brevet le 01/04/94 :
    . versement initial de 70 000 F ;
    . versement 6 redevances, chacune étant payée le 01/04 ;
    . date 1ère redevance le 01/04/95 ;
    . chaque redevance doit être égale à 8 % du chiffre d'affaire HT engendré par l'exploitation du brevet dans les 12 derniers mois.

La société a estimé la valeur d'entrée du brevet dans son patrimoine en tenant compte des prévisions suivantes :
    . CA HT généré du 01/04/94 au 01/04/95 : 1 000 000 F ;
    . Taux de croissance moyen du CA : 5 %.

Le brevet a été inscrit à l'actif pour la valeur estimée arrondie à la dizaine de milliers de F la plus proche, amortissement sur 5 ans.

PÉRIODES

PRÉVISIONS DU CA

PRÉVISIONS DES REDEVANCES

01/04/94-01/04/95

01/04/95-01/04/96

01/04/96-01/04/97

01/04/97-01/04/98

01/04/98-01/04/99

01/04/99-01/04/00

1 000 000

1 000 000 x 1, 05 = 1 050 000

1 000 000 x 1,05² = 1 157 625

Puissance 3

Puissance 4

Puissance 5

80 000 F

84 000 F

88 200 F

92 610 F

97 241 F

102 103 F

 

6 801 913 F

544 154 F

La somme des redevance fait 544 154 F.
La valeur d'entrée du brevet : 70 000 + 544 154 = 614 154 F arrondie à 610 000 F.

A la date du 01/04/94 :

205000 Concessions et droits similaires, brevets, licences... (coût d'entrée) 610 000  
512000           Banque (sommes stipulée au contrat et réglée au comptant)   70 000
404000           Fournisseurs d'immobilisation (partie estimée donnant lieu au paiement de redevances annuelles   540 000

La redevance versée le 01/04/97 a été égale à 230 000 F. Après le versement, le total des versements est égal à 576 000 F.

A la date du 01/04/97 :

404000 Fournisseurs d'immobilisation 230 000  
512000           Banque   230 000
681100 D.A. des immos incorpo & corpo  122 000  
280500           Amortissement des concessions et droits similaires, brevets, licences...   122 000

État du compte fournisseurs d'immobilisations après le versement du 01/04/97 :
    . Débit : 540 000 F ;
    . Crédit : 230 000 F + 276 000 F (versement du 01/04/95 et 01/04/96).

Il reste donc à verser 34 000 F pour solder le compte.

Les redevances versées à la date du 01/04/98 est de 240 000F

        A - Solution fiscale

A la date du 01/04/98 :

404000 Fournisseurs d'immobilisation (solde) 34 000  
205000 Concessions et droits similaires, brevets, licences... 206 000  
512000           Banque   240 000

A la date du 31/12/98 :

681100 D.A. des immos incorpo & corpo 163 200  
687100 D.A. exceptionnels sur immobilisations 154 500  
280500           Amortissement des concessions et droits similaires, brevets, licences...   317 700

(1) 163 200 = (610 000 + 206 000) x 20 %
(2) 154 500 = 206 000 x 20 % x (3/12 + 3)

        B - Solution comptable

A la date du 01/04/98 :

404000 Fournisseurs d'immobilisation (solde) 34 000  
678800 Charges exceptionnelles diverses 206 000  
512000           Banque   240 000

!!! 678800 non déductible

A la date du 31/12/98 :

681100 D.A. des immos incorpo & corpo 122 000  
280500           Amortissement des concessions et droits similaires, brevets, licences...   122 000
687200 D.P. réglementées (immobilisation) 195 700  
145000           Amortissements dérogatoires   195 700

(1) 122 000 = 610 000 x 20 %
(2) 195 700 = 317 700 - 122 000